8 février 2017

La disparition de la flore française

La disparition de la flore française

L’écologie est un sujet d’actualité et la biodiversité mondiale est en danger. On parle souvent des espèces exotiques ou connues, mais il existe de nombreuses autres espèces propres à la France. Si les territoires d’outre-mer possèdent de nombreuses plantes endémiques – c’est-à-dire, qui n’existent que dans une zone géographique spécifique et sont introuvables ailleurs – il en existe d’autres, méconnues la plupart du temps, en métropole, qui sont également en danger.
Parlons un peu de celle qu’on oublie trop souvent, la flore de la France métropolitaine.

Liste rouge des espèces menacées

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), une organisation internationale, publie régulièrement des rapports sur la biodiversité mondiale pour estimer son état et prendre des mesures. En 2012, elle a notamment publié un rapport sur la flore mondiale.

En association avec la Fédération des conservatoires botaniques nationaux (FCBN), l’Institut national du patrimoine naturel (INPN) et le Muséum d’histoire naturelle (MNHN), le comité français de l’UICN a publié à cette occasion une mise à jour de la liste rouge des espèces menacées de France.

Les espèces étudiées ici sont les espèces dites « vasculaires », c’est-à-dire l’ensemble des fougères, plantes à graines et plantes à fleurs. Assez alarmante, cette liste indique notamment que, sur les 1 048 espèces, sous-espèces et variétés étudiées, 513 sont en danger d’extinction.

Les raisons principales de cette situation sont humaines : urbanisation du territoire, modification et destruction d’espaces naturels, pollution, drainage ou contamination de l’eau ou encore abandon de méthodes traditionnelles d’agriculture.

Enjeux et moyens

La France s’est engagée dans la Convention sur la biodiversité écologique (1992) à préserver sa biodiversité sur son territoire. L’objectif de la liste rouge est de dresser un bilan le plus complet possible, afin de pouvoir agir en conséquence pour tenter de préserver au mieux espèces et milieux naturel·les. L’UICN possède une liste de critères afin d’évaluer une espèce, qui est reconnue comme la plus fiable : elle sert donc de référence mondiale.

Son évaluation se base sur plusieurs critères, notamment la taille de la population de l’espèce, l’aire de sa répartition géographique, son taux de déclin et son degré de fragmentation géographique. La comparaison des données avec les seuils quantitatifs fixés pour chaque critère permet ensuite d’estimer l’état de l’espèce et de déterminer son facteur de risque d’extinction.

Les espèces sont catégorisées selon leur état : en danger critique (CR), en danger (EN) et vulnérable (VU), bien sûr, mais également éteintes au niveau mondial, à l’état sauvage (c’est-à-dire qui n’existe plus que dans des jardins botaniques par exemple), ou disparues de métropole dans le cas de la France.

Parmi les 513 espèces en danger, 73 sont strictement endémiques de la France métropolitaine : elles n’existent nulle part ailleurs sur la planète et leur conservation a donc un enjeu plus important. Certaines sont en danger critique, comme la renoncule de Sylvie ou la violette de Rouen. Trois autres de ces espèces sont déjà déclarées éteintes à l’état sauvage mais survivent encore dans des jardins botaniques. La violette de Cry, elle, n’a pas eu cette chance et est désormais éteinte.

Quelques exemples

L’armérie de Belgentier (Armeria belgenciensis Donald. ex Kerguélen) est une espèce endémique de la métropole, qui n’existe plus que dans le sud de la France, dans le Var. Présente sur la liste rouge des espèces depuis 1990, elle est désormais en danger critique d’extinction. Les derniers pieds existants se trouvent à Solliès-Toucas et sont très protégés.

Aussi endémique du sud de la France dans les Hautes-Alpes, les Alpes-de-Haute-Provence et le Vaucluse, la petite centaurée de Favarger (Centaurium favargeri Zeltner) est quant à elle en danger d’extinction : il est encore temps de la protéger pour éviter que sa situation ne s’aggrave.

En danger critique d’extinction bien que les données soient minces, la saxifrage œil-de-bouc (Saxifraga hirculus Linné) est une plante qui n’est connue en France que dans le Jura, sur un site du bassin du Drugeon. Bien que n’étant pas endémique du pays, il s’agit là de la dernière population viable de l’espèce au monde : elle est donc protégée par divers programmes, sa disparition ayant pour cause la destruction de son habitat, les tourbières.

Mesures de conservation

L’étude citée dans cet article n’a pour l’instant évaluée que 1 048 espèces, sous-espèces et variétés des espèces vasculaires : or ces institutions estiment qu’il en existe environ 4 400 différentes en France métropolitaine, en plus de 3 000 espèces non vasculaires – sans compter les territoires d’outre-mer. Certaines font déjà partie de la liste rouge sans avoir été évaluées : il faut donc améliorer les actions de protection et de sauvegarde de la flore, pour éviter que toutes ces espèces ne s’éteignent un jour, bien que les banques de graines, de plus en plus répandues, permettent d’en garder une trace.

Pour le moment, diverses actions sont mises en œuvre en France : certaines espèces font l’objet de plans nationaux d’actions, d’autres bénéficient de mesures de protection ou sont également élevées dans des jardins botaniques. Il existe des arrêtés nationaux et régionaux pour protéger certaines espèces ou sous-espèces, qui sont renforcés par des conventions internationales mais aussi par la directive européenne « Faune, Flore, Habitat » de 1992. Cette directive a permis de mettre en place le réseau Natura 2000, qui définit et délimite un ensemble de sites naturels en Europe pour leur rareté ou leur fragilité, et permet de mettre en œuvre divers moyens de préservation : c’est par exemple le cas pour la dernière zone où la saxifrage œil-de-bouc est présente en France.

Les organisations

Cette étude a été principalement réalisée avec la participation du comité français de l’UICN, le Muséum d’histoire naturelle (MNHN), et l’Institut national du patrimoine naturel (INPN), organisations gouvernementales pour la conservation et la protection de l’environnement.

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) française est un comité qui regroupe deux ministères, 13 organismes publics et 41 organisations non-gouvernementales ainsi qu’un large nombre d’experts. Leur but est de protéger l’environnement à travers l’éducation, diverses actions et des programmes gouvernementaux. Ils étudient également la faune et la flore pour mettre en place des mesures de protection et de conservation efficaces. L’UICN dispose d’un réseau mondial pour une plus grande efficacité, avec plus de 1 000 membres dans 148 pays.

L’État se doit d’avoir un inventaire national du patrimoine naturel de France : associé aux régions, le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) assure la responsabilité scientifique des recherches et collabore avec l’Institut national du patrimoine naturel (INPN), qui permet de rassembler et de standardiser les données : chaque espèce possède sa fiche détaillée, qui permet de suivre son évolution.

La violette de Cry était une espèce endémique de France, plus particulièrement de l’Yonne, et qui est maintenant éteinte. Découverte tard, en 1866, et déjà rare à cette époque, son habitat naturel a été détruit par la création de carrières et elle a disparu au cours de la première moitié du XXe siècle.

De la même manière que cette plante a été peu connue, il existe de nombreuses autres espèces, communes ou rares, qui ne demandent qu’à exister. Il s’agit donc de protéger la biodiversité de la métropole française, qui recèle de trésors cachés, afin qu’ils ne disparaissent pas au cours des années à venir.