
Dans l’article précédent, vous avez pu comprendre comment marchait le combo œstrogènes-progestatifs (OP) pour assurer votre contraception. Maintenant, place aux applications pratiques !
L’efficacité des OP est de 91 %. Chaque année, 9 % des utilisateurices vont donc être enceint·es. Ça vous semble beaucoup comparé à ce que vous avez entendu jusqu’ici ? C’est que dans les notices ou les cours théoriques sur la contraception, deux infos peuvent co-exister : l’efficacité en « emploi parfait », et celle en « emploi typique ». Plus précisément, l’efficacité théorique, mesurée lors de tests réalisés en conditions contrôlées (patient·es encadré·es, donc pas d’oubli, sans pathologies intercurrentes, ayant un indice de masse corporelle standard), contre l’efficacité réelle constatée lors d’une utilisation en population générale (la vraie vie, quoi). Seule l’efficacité réelle est importante à connaître, puisque c’est celle à laquelle on est confronté·es au quotidien.
Pour le détail des effets indésirables des OP, je vous renvoie à l’article complet sur la théorie. Grosso-modo, les plus fréquents sont des maux de tête, des tensions dans les seins, une augmentation ou diminution de l’appétit, une baisse du désir sexuel, des troubles de l’humeur, une sécheresse vaginale, de la rétention d’eau.
Une majorité du temps, si des effets indésirables se font ressentir lors de l’instauration de la contraception, le corps s’habitue et les effets se tassent rapidement. Il est donc en général intéressant d’essayer une nouvelle méthode ou dosage au moins 3 mois, mais bien entendu, si vous ne vous sentez pas bien, vous avez le droit de changer plus tôt que ça.
Pour les modalités de prescription, un article complet suivra sous peu. En version courte, il vous faudra une ordonnance de sage-femme ou de médecien·ne, pour un an (la pharmacie peut vous délivrer les quantités nécessaires pour 3 mois, et vous y retournez avec la même ordonnance pendant un an, pour la France ; en Belgique, vous pouvez directement avoir la délivrance pour un an), après une consultation qui n’a pas du tout besoin d’inclure un examen physique (ni l’examen au spéculum, ni le frottis, ni la palpation des seins n’ont d’intérêt pour vous prescrire une contraception).
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Une contraception OP peut se commencer à différents moments. Soit au premier jour des règles, soit immédiatement après une IVG ou une fausse-couche, soit 3 à 6 semaines après un accouchement ; dans ces 3 cas vous êtes protégé·e immédiatement. En dehors de ces cas, vous pouvez la commencer à n’importe quel moment à condition d’être certain·e de ne pas être déjà enceint·e, et en continuant une autre contraception en parallèle pendant encore 7 jours.
Il en existe plusieurs dizaines (dont en réalité beaucoup de doublons avec des noms différents). Comment savoir laquelle va vous convenir ? Il n’y a malheureusement qu’une seule méthode : essayer.
Un·e prescripteurice qui vous assure que telle ou telle pilule sera absolument parfaite pour vous est sans doute de bonne foi, mais surestime totalement l’étendue et la qualité des connaissances actuelles sur l’équilibre hormonal. Il est vrai qu’empiriquement, certains dosages sont censés être plus favorables à tel ou tel type d’effet secondaire, mais en pratique, c’est trop imprévisible pour être utilisé à coup sûr.
De la même façon, le discours « telle pilule est très légère, donc mieux tolérée »
ne repose sur aucune base scientifique. D’abord, parce que toutes les pilules actuellement sur le marché sont, médicalement parlant, des « mini-dosées » en œstrogène. Ensuite parce que selon le type d’effet secondaire, une pilule plus fortement dosée sera parfois mieux tolérée, justement.
Quelques études ont étudié différents dosages les uns par rapport aux autres, et tendent à montrer des différences significatives pour un effet secondaire donné. Mais en voulant éviter une nuisance en particulier, on peut du même coup favoriser d’autres effets indésirables…
Il y a aussi la nouvelle mode, les œstrogènes « naturels ». Qui sont très naturellement synthétisés en laboratoire tout autant que les œstrogènes plus fréquemment utilisés, mais dont la structure chimique est plus ressemblante, il est vrai, à celle de l’œstrogène naturel. Ça nous fait une belle jambe, ces pilules ne sont ni mieux ni moins bien tolérées que les autres dans les études. Si c’est la vôtre et qu’elle vous convient, alors tant mieux pour vous ! Mais comme elles sont parmi les plus chères puisqu’assez récentes, il n’y a aucune raison qu’on vous l’impose en première intention.
En bref, la logique, c’est donc de partir sur un dosage assez standard, une pilule de 2e génération (puisque remboursée et à moindre risque cardio-vasculaire) avec le même dosage tout au long de la plaquette. Si on tombe juste du premier coup, c’est tout bénéfice, vous êtes en confort avec une pilule pas chère. Si les effets indésirables se pointent, selon ceux que vous ressentez, on pourra vous en faire essayer une autre a priori plus favorable sur ces effets-là. Sans garantie magique, vous l’aurez compris. Pas de quoi désespérer pour autant, il n’est pas rare de devoir en tester 3 ou 4 avant de tomber sur une qui vous convienne. Et si aucune ne vous convient, il reste à essayer d’autres modes de diffusion et d’autres types de contraceptifs.
Toutes les pilules ne sont pas remboursées. En France, seules les pilules de 2e génération le sont, en Belgique, c’est au cas par cas (mais une majorité le sont). Les prix varient généralement de 3 à 40 € pour 3 plaquettes. Si on vous a prescrit une pilule trop chère pour votre budget, vous êtes tout à fait en droit d’en changer pour ce motif.
Il existe des pilules avec 28 comprimés au lieu des classiques 21, dont 4 ou 7 comprimés placebo, destinés à remplacer les jours de pause habituellement observés entre 2 plaquettes. L’intérêt est de ne pas interrompre sa prise, donc de ne pas s’emmêler les pinceaux dans les jours d’arrêt ou de reprise. Plus confortable pour certain·es, qui souhaitent une prise avec saignements sans devoir s’arrêter. Pour rappel, la période de saignement, l’hémorragie de privation, n’est pas obligatoire (voir l’article sur le fonctionnement des OP). Et même si habituellement vous observez un schéma de prise avec saignements, si à l’occasion ce n’est pas le moment de saigner, il suffit de sauter les comprimés placebo et de passer directement à la plaquette suivante.
Concrètement, vous prenez votre comprimé tous les jours à peu près à la même heure. Vous avez 12 heures pour le prendre, donc ce n’est pas à la minute non plus. Il est souvent plus facile de ne pas l’oublier si vous l’associez à une habitude déjà ancrée chez vous. Si par exemple il vous est impossible de dormir les dents pas lavées et que votre plaquette est à côté de votre brosse à dent, ce sera plus facile d’y penser. C’est également une bonne habitude d’avoir une plaquette de secours dans votre portefeuille ou autre support ne vous quittant jamais : un imprévu, vous avez quand même votre pilule avec vous. À la fin de la plaquette, s’il s’agit d’une pilule à 21 comprimés, vous faites au choix 7 jours de pause ou pas ; s’il y a eu une pause, le 8e jour vous recommencez une plaquette, même si vous saignez encore. Pour les pilules à 28 comprimés, il n’y a pas de pause entre deux plaquettes.
Il n’y a aucune limite médicale au nombre de plaquettes enchaînées si vous choisissez un schéma sans saignement ; par contre, chez certain·es, au bout de plusieurs plaquettes d’affilée, des saignements non-programmés, les spottings, peuvent apparaître. Ce n’est pas grave du tout, simplement les réactions de chaque corps étant différentes, parfois il se produit même sous OP un léger épaississement de l’endomètre (le même mécanisme que pour les règles, mais en plus faible), et comme rien ne reste jamais bloqué dans l’utérus, vous saignez quelques jours en quantités variables. Dans ce cas, si vous avez bien déjà pris au moins 21 comprimés d’affilée, faites une pause de 4 jours, puis reprenez. Avec l’habitude, vous saurez : certain·es peuvent enchaîner 12 mois sur 12, d’autres apprennent qu’au-delà d’un certain nombre de plaquettes, les spottings risquent de débarquer à l’improviste. Une fois que vous connaissez vos réactions, vous pouvez programmer vos pauses au mieux.
Si vous oubliez un comprimé pendant plus de 12 heures par rapport à votre horaire habituel, prenez quand même votre comprimé dès que vous vous en rendez compte ; continuez votre plaquette ; si vous avez eu un rapport sexuel potentiellement fécondant dans les 5 jours précédant l’oubli, prenez en plus une contraception d’urgence ; et pendant les 7 jours suivants, vous n’êtes pas aussi bien protégé·e, donc préservatifs en cas de rapport potentiellement fécondants. Si l’oubli survient sur un des 7 derniers comprimés de la plaquette (les 7 derniers avant les comprimés placebo pour une pilule à 28 comprimés), enchaînez les plaquettes ce mois-ci (ou zappez les placebos).
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En cas de grossesse sous pilule, ce n’est pas l’absence de règles qui va pouvoir vous alerter (l’hémorragie de privation peut avoir lieu même si vous êtes enceint·e), donc si vous avez d’autres symptômes suspects (nausées, fatigue inhabituelle, tensions des seins), n’hésitez pas à faire un test de grossesse pour être tranquille.
En cas de vomissements ou de diarrhée liquide dans les 4 heures après avoir pris un comprimé, il n’a pas eu le temps d’être efficace, donc prenez les mêmes précautions qu’en cas d’oubli. Et si vous êtes fréquemment sujet·te à des troubles digestifs (en cas de maladie inflammatoire de l’intestin ou de troubles du comportement alimentaire, par exemple), la pilule n’est peut-être pas la méthode la plus adaptée.
Il s’agit d’un timbre autocollant qui diffuse les OP directement dans le sang à travers la peau. Il se change une fois par semaine. L’intérêt est donc principalement de simplifier la prise. Le dosage (pour l’instant il n’y en a qu’un seul disponible en France, Belgique et Suisse) est différent de celui des pilules existantes, donc il peut parfois être mieux (ou moins bien) toléré.
Le patch se colle sur le corps, en évitant les seins et le ventre. Il se change tous les 7 jours, pendant 3 semaines. La 4e semaine, même principe que la pilule : soit vous souhaitez saigner, auquel cas vous faites une pause de 7 jours, et le 8e jour vous en remettez un nouveau même si vous saignez encore ; soit vous ne souhaitez pas saigner et vous remettez un nouveau patch d’emblée.
Il tient plutôt bien à la baignade ; en revanche les transpirations importantes peuvent le décoller, attention en cas d’effort sportif soutenu ou de soin type hammam ou sauna. Si le patch se décolle, vous avez 3 heures pour en remettre un nouveau.
Si vous êtes resté·e plus de 3 heures sans patch (hors la semaine de pause) ou si vous avez oublié de le changer pendant plus de 24 heures, remettez un nouveau patch aussitôt que possible ; si vous avez eu un rapport sexuel potentiellement fécondant dans les 5 jours précédant l’oubli, prenez en plus une contraception d’urgence ; et pendant les 7 jours suivants, vous n’êtes pas aussi bien protégé·e, donc préservatifs en cas de rapport potentiellement fécondant. Si l’oubli survient sur la 3e semaine, ne faites pas de pause ce mois-ci et enchaînez sur un nouveau patch.
Comme sous pilule, ce n’est pas l’absence de saignements qui vous alertera en cas de grossesse, donc si vous avez des symptômes suspects, n’hésitez pas à faire un test pour en avoir le cœur net.
Le patch n’est pas remboursé, il vous coûtera entre 12 et 20 € par mois.
L’anneau est en plastique souple, imprégné d’OP. Il se positionne au fond du vagin, où les OP vont se diffuser à travers la muqueuse. Il se plie puis se pousse dans le vagin comme un tampon, et vous le retirez vous-même au moment du changement en glissant un ou deux doigts pour l’attraper. Il ne se change qu’une fois par mois, donc comme avec le patch l’intérêt est de vous simplifier la prise. Il peut également être mieux ou moins bien toléré qu’une pilule.
L’anneau reste en place en théorie pendant 21 jours. Il est en réalité efficace pendant 28 jours, vous pouvez donc le garder jusqu’à 4 semaines. Au bout de 3 à 4 semaines, vous le retirez ; si vous souhaitez saigner, pause de 7 jours avant d’en remettre un ; sinon, vous remettez le suivant directement.
L’anneau n’est pas supposé être gênant ; il est calé par les muscles du vagin, et ne va pas non plus tomber tout seul. Pendant les rapports sexuels, le ressenti est variable. S’il représente une gêne, il est possible de le retirer pendant moins de 3 heures.
Si vous avez retiré ou perdu l’anneau pendant moins de 3 heures, vous pouvez le rincer à l’eau froide et le remettre. C’est à la chaleur du corps que le support plastique relâche les hormones, alors ne le passez jamais sous l’eau chaude, ou les OP finiront au fond de l’évier ! Si vous êtes resté·e sans anneau pendant plus de 3 heures, ou si vous l’avez gardé plus de 28 jours, remettez-en un dès que possible, et pour les précautions à prendre pour éviter une grossesse, je vous renvoie au même paragraphe à propos du patch.
Comme le patch, pas de remboursement, et 12 à 20 € par mois de budget à prévoir.
Vous voilà plus éclairé·es, je l’espère ! Rendez-vous pour la suite de la série avec le détail du parcours médical pour obtenir une contraception.