
Le minimalisme est à l’origine un mouvement artistique qui se veut comme un retour à la substantifique moelle d’une œuvre. De l’art, ce mouvement est devenu un mode de vie, popularisé notamment à travers le documentaire Netflix sorti en 2016, Minimalism: A Documentary About the Important Things (Minimalisme : un documentaire à propos des choses qui comptent). Les personnes minimalistes cherchent à échapper à la société de consommation, qui pousse les gens à acheter des choses dont iels n’ont pas besoin.
Les personnes minimalistes pensent que posséder moins de choses permet de se sentir mieux dans sa vie et d’être plus heureuxes. Le mouvement minimaliste consiste donc à ne vivre qu’avec des choses essentielles et à se débarrasser du superflu. Ainsi, ces personnes réduisent leurs possessions matérielles au maximum, en ne gardant que des choses utiles et utilisées régulièrement. Nous vous proposons quelques conseils pour, vous aussi, réduire vos possessions et pourquoi pas, devenir minimalistes...
Les modes de vie zéro déchet et minimaliste sont fortement liés car ils poussent à changer de mode de consommation. Le fait de travailler à la réduction de mes déchets m’a amenée à revoir ma façon de consommer et le rapport que j’avais aux choses. Le minimalisme m’est apparu comme la suite logique de la transformation de mon mode de vie. La société ultra-capitaliste et consumériste dans laquelle nous vivons valorise l’argent, mais surtout les achats que nous effectuons : « J’achète donc je suis. »
Le mouvement minimaliste permet de prendre du recul par rapport à cette dynamique. Posséder moins et apprendre à vivre avec peu permet de se rendre compte à quel point l’injonction à dépenser son argent est présente dans nos vies. Tou·tes les minimalistes ne sont pas anticapitalistes, loin de là, mais tou·tes passent par une épiphanie, où iels se rendent comptent que la moitié (si ce n’est plus) de leurs possessions leur sont inutiles. Pourquoi avoir acheté quelque chose d’inutile ? Parce que nous subissons une pression constante du capitalisme qui, à terme, créé un faux besoin. L’anticapitalisme cherche à briser ce cercle vicieux et à réduire la place omniprésente de l’argent dans notre société.
Être minimaliste consiste donc à identifier ses besoins réels et à vivre en fonction d’eux. Cet article vise à vous donner quelques pistes pour vous aider à désencombrer votre maison. Ces conseils sont donnés à titre indicatif, parce que les besoins de chaque personne sont différents.
Premièrement, identifiez pourquoi vous voulez réduire vos possessions. Est-ce parce que vous voulez faire des économies ? Parce que vous trouvez votre vie trop encombrée ? Chacun·e a ses propres raisons ! Les miennes étaient de moins et surtout mieux consommer, tout en mettant de l’argent de côté pour mes futurs projets.
L’étape suivante est de définir ce que vous aimez. Cela permet de savoir ce que vous allez garder en priorité. Le minimalisme n’est pas le dénuement total mais au contraire s’entourer uniquement de choses que l’on aime. Si vous êtes passionné·e de cuisine, vous ne pourrez probablement pas vivre avec deux assiettes et une poêle. Même chose si la mode est votre dada, vous n’êtes pas obligé·e d’avoir une garde-robe « capsule » de 20 éléments. J’adore lire et pour moi rien ne vaut l’odeur du papier et le poids de l’objet dans ma main. Je savais que je ne pourrais pas réduire ma bibliothèque car j’aime tous mes livres. Si je ne devais avoir que des livres utiles, je serai entourée de manuels de cours et ce n’est pas exactement ma vision du bonheur… En revanche, je m’habille toujours avec les mêmes vêtements : mon armoire a donc été sujette à une grosse réduction.
Bibliothèque épurée avec livres et calendrier. Crédits photo : Anthony Delanoix.
Plusieurs méthodes de tri existent. Vous pouvez trier par pièce, par catégorie d’objet, par zones de votre lieu de vie, c’est vous qui voyez ! Vivant dans un studio, j’ai appliqué une méthode un peu hybride. Je me suis d’abord attaquée aux endroits les plus évidents, soit mes rangements, placard par placard, boîte par boîte. J’ai sorti toutes mes possessions (oui, même les chaussettes et les petites cuillères) et je les ai regardées en me demandant si j’y étais vraiment attachée. À la fin du tri, tout était réparti dans trois piles : celle que je garde, celle dont je me débarrasse et celle de l’incertitude.
Ce que je gardais était soit indispensable, soit quelque chose auquel j’étais très attachée (souvent les deux à la fois). Cette pile demande une analyse concrète et honnête de ce qui nous sert. L’attachement émotionnel est ce qui retient la plupart des gens. Comme ce pantalon qui nous allait parfaitement il y a quelques années mais plus du tout maintenant, que l’on garde dans l’espoir de changer assez pour le reporter. Le fait est que voir ce pantalon dans son armoire ne vous procure pas de bonheur, mais est un rappel constant de ce que l’on est pas, ou plus. Cela demande un certain effort de l’enlever de sa vie, mais ça vaut le coup !
La pile de ce dont je me débarrassais était constituée de choses qui ne me servaient concrètement à rien ou qui ne m’apportaient aucune émotion positive. Exit donc les belles assiettes qui ont servi deux fois, les couverts surnuméraires, les vêtements plus à ma taille, le maquillage périmé et les carnets remplis.
La question suivante qui se posait était : se débarrasser de tout ça, oui, mais comment ?
N’ayant pas la patience de mettre en vente et pouvant me passer de l’apport d’argent que cela aurait engendré (ce qui n’est pas le cas de tout le monde), j’ai donné tout ce que je pouvais à des associations ou à des ami·es. Je voulais jeter le moins de choses possible pour rester cohérente avec mon mode de vie zéro déchet. J’ai recyclé tout ce que j’ai pu et donné une nouvelle vie au reste. Par exemple, les vieilles chaussettes font de très bons chiffons de ménage !
Cependant, tout n’est pas aussi simple, et surtout, le tri ne se fait pas en une fois, d’où l’existence de la pile « incertitude ». Il y a des choses auxquelles on s’accroche, alors que l’on vit très bien sans le reste de l’année. Dans ma pile incertaine, il y a avait des lettres, des photos, quelques babioles… J’ai tout emballé loin de ma vue et j’ai décidé plus tard. Si j’allais chercher quelque chose dans cette boîte, c’est que j’en avais besoin. Si au contraire, au bout d’un certain laps de temps j’avais oublié ce qui était dans cette boîte, c’est que je pouvais m’en passer. Plusieurs méthodes existent, comme celle du « 90/90 » : si je ne l’ai pas utilisé dans les 90 derniers jours et que je ne compte pas le faire dans les 90 prochains, je devrais sûrement m’en séparer.
Le minimalisme ne touche pas que les possessions matérielles. Quand avez-vous fait un tri dans vos mails pour la dernière fois ? Et dans les mailing lists auxquelles vous êtes abonné·e ? Le téléphone, l’ordinateur, les disques durs externes sont des lieux auxquels on ne pense pas mais qui sont souvent très encombrés. Le tri se fait globalement de la même manière que pour le reste. Vider la boîte des spams, se désabonner de ces newsletters qu’on n’ouvre jamais, etc. Tout cela économise à terme de l’énergie (oui, le stockage informatique consomme beaucoup d’énergie et de ressources) et de la place dans votre boîte mail. Même chose pour les applications : Facebook, Twitter, votre banque et la Caf sont tou·tes accessibles par un navigateur Internet classique.
Pour moi, l’économie s’est faite au niveau du temps. Attention, je ne dis pas que passer plusieurs heures par jour sur Twitter est néfaste, bien au contraire ! Mais dans les objectifs que je m’étais fixés, il y avait celui de dégager davantage de temps dans ma journée.
Faire le tri dans ses affaires est chronophage et énergivore. Il n’est pas possible de tout faire en une fois, surtout pour quelqu’un·e avec peu de cuillères. En parallèle du tri, un changement progressif de mode de vie peut aider à réduire ses possessions.
Par exemple, éviter d’acheter sur un coup de tête et s’accorder un moment de réflexion permet de se demander si cet objet est vraiment utile. C’est tout à fait normal de se sentir attiré·e par quelque chose de beau dans une vitrine, mais on peut admirer la beauté de l’objet sans pour autant le posséder. C’est un travail de déconstruction progressif, étant donné que la société de consommation et les techniques du marketing poussent à l’achat. Si vous avez besoin de quelque chose, dressez une liste des caractéristiques que vous recherchez dans cet objet. Ainsi, vous posséderez quelque chose qui vous plaît vraiment, et que vous n’aurez pas acheté par défaut.
Comme dit précédemment dans cet article, le minimalisme est lié à l’adoption d’un mode de consommation durable et le plus écologique possible. Je ne peux que vous recommander d’acheter d’occasion, lorsque c’est possible. Le troc est également une solution alternative. Les communautés en ligne comme hors ligne se retrouvant autour des thématiques écologistes, ZD ou minimalistes sont un moyen de trouver des alternatives pour le don, la vente ou le troc des objets de seconde main.
Si le fait de réduire ses possessions prend du temps, ce même temps est économisé à la fin du processus. Avoir moins d’objets rend le rangement plus facile, puisque chaque chose à désormais une place. Même avantage pour le ménage car les surfaces sont généralement moins encombrées. Par exemple, Charly en parlait dans son article sur cuisiner quand on a peu d’énergie : posséder peu de vaisselle pousse à la nettoyer plus souvent, ce qui évite l’accumulation et le manque de motivation face à la tâche à accomplir.
Je n’ai volontairement pas mis de ressources autres que ma propre expérience dans cet article. En effet, bien que j’adhère totalement au concept du minimalisme, la plupart des gens qui en parlent sur Internet présentent des solutions peu accessibles. Il y a une large majorité de femmes cisgenres, blanches, issues de classes sociales (très) aisées, qui aiment avoir une maison digne d’un tableau Pinterest.
J’ai très rarement vu de ressources à disposition de personnes en difficulté financière. Et j’ai trop souvent vu des comportements de type : « Je peux jeter la moitié de ma maison, de toute façon j’ai les moyens de tout racheter. » Rendre le dénuement séduisant invisibilise les gens qui vivent avec peu par obligation. J’ai adopté ce mode de vie par résolution anticapitaliste, ce n’est pas le cas des minimalistes médiatisé·es. À mon sens, c’est le plus gros travers du mouvement, car il n’est jamais présenté sous l’angle anticapitaliste ou écologique, mais plutôt sous celui de la « recherche du bonheur ».
Pièce avec des rideaux blancs, un bureau et une chaise en bois, une plante. Crédits photo : Hutomo Abrianto.
De plus, les ressources sur le minimalisme parlent rarement des côtés négatifs. Par exemple, avoir une garde-robe minimaliste implique de faire des lessives plus souvent, ou posséder peu de vaisselle peut devenir compliqué en cas de repas avec beaucoup de convives. Ces mêmes ressources poussent également à une compétition de « qui aura le moins » alors que tout le monde ne peut clairement pas vivre avec un sac à dos. Cela induit en erreur, voire décourage les aspirant·es à une vie plus simple. L’exemple typique est les fameuses capsule wardrobes ou « garde-robes capsule », où une femme cisgenre, blanche, mince et aisée nous explique que sa garde-robe ne comporte que 20 vêtements… sans mentionner ses pyjamas, sous-vêtements, vêtements de sport et vêtements d’hiver.
Pour conclure, je ne peux que vous recommander de réduire vos possessions matérielles. Ça fait du bien au portefeuille, à la planète et ça permet de prendre du recul par rapport au mode de consommation classique de notre société. Attention cependant à ne pas se faire avoir par l’idéalisation d’un mode de vie bien moins agréable quand il est subi.