
Vous en avez sûrement entendu parler ces derniers mois, les tiny houses sont partout. Présentées tour à tour comme une solution miracle ou bien un piège à bobo en mal de greenwashing, que sont-elles vraiment ?
Si l’on se contente de traduire littéralement, une tiny house est une toute petite maison, ce qui n’a rien de révolutionnaire ! Des millions de personnes ont des habitations minuscules, souvent plus par nécessité économique que par choix.
Le tiny house movement est né aux États-Unis au début des années 2000 sous l’impulsion de personnes intéressées par l’écologie et la simplicité volontaire. Il s’agit ici d’avoir une habitation qui correspond à ses convictions, en économisant les ressources et en évitant l’accumulation d’objets inutiles.
Ces petites maisons sont construites sur roues, et ont pour limites le poids supporté par la remorque et les dimensions maximales pour ne pas être considérées comme un convoi exceptionnel.
Elles sont donc mobiles et permettent, au choix, de s’installer durablement sur un terrain avec parfois des aménagements supplémentaires (terrasse, salon de jardin…), de se déplacer régulièrement au gré des envies, sans avoir de terrain attitré, ou bien un mélange des deux. Depuis quelques années, les tiny houses ont également commencé à se développer en France, avec par exemple Baluchon de Laëtitia Dupé. Cette designeuse nantaise a commencé par construire sa propre tiny, et en fabrique maintenant pour les autres.
Photos de l’extérieur et de l’intérieur de la tiny house Baluchon de Laëtitia Dupé.
Réduire sa maison, c’est réduire son empreinte écologique.
Déjà parce qu’une maison plus petite consomme moins d’énergie, en chauffage par exemple (à condition d’être bien isolée, bien entendu), mais aussi parce qu’on peut envisager l’autonomie énergétique beaucoup plus facilement avec 18 m² qu’avec une maison de 400 m².
C’est ce que les États-Unien·nes appellent être off grid (par opposition à on grid, relié·e au réseau) : il est possible de s’alimenter en électricité avec des panneaux photovoltaïques, d’utiliser l’eau d’un puits ou d’une citerne de collecte d’eau de pluie, d’avoir un système d’assainissement individuel pour traiter les eaux usées… Comme pour le déplacement, on peut décider d’être totalement autonome, d’être tout le temps relié·e au réseau ou bien de combiner les deux.
Bien entendu, cela demande quelques ajustements : il est hors de question de rejeter dans la nature ce que l’on appelle des eaux noires, c’est-à-dire des eaux souillées par des matières fécales ou des produits chimiques. Elles doivent être traitées avant de pouvoir être rejetées, ce qui demande de grosses infrastructures, incompatibles avec une maison mobile.
En utilisant des produits écologiques pour les usages ménagers (vaisselle, ménage…), on peut rejeter les « eaux grises » (eaux faiblement polluées) dans la nature (pour arroser les plantes, laver une voiture…) sans risque.
Reste le problème des matières fécales, qui peut être réglé très simplement en utilisant des toilettes sèches. En plus de ne pas utiliser d’eau, elles permettent de revaloriser ces déchets, qui sont transformés en compost. Je vous rassure tout de suite : les toilettes sèches d’une tiny house n’ont rien à voir avec celles d’un festival le dimanche matin !
Un des arguments de poids des tiny houses, c’est qu’étant mobiles, elles ne nécessitent pas de permis de construire, ne sont pas soumises à la taxe foncière et peuvent être installées sur des terrains non constructibles, puisqu’elles n’ont pas d’emprise au sol.
Enfin, parlons du coût d’une tiny. Il est bien entendu très variable, en fonction de si vous tentez l’autoconstruction ou si vous faites appel à des professionnel·les, en fonction des matériaux utilisés, des équipements que vous décidez de mettre dedans et de plein d’autres critères, mais il est possible de construire sa propre maison pour 20 000 € (c’est ce qu’a coûté Baluchon, la maison en photo plus haut) et on trouve des modèles déjà construits à partir de 23 000 €. Bien entendu, certaines tiny sont beaucoup plus chères (j’en ai vu aux alentours de $ 60 000), mais ça n’est rien comparé au coût de construction d’une maison classique, non ?
Cet ordre de prix permet d’éventuellement envisager de payer sa maison comptant et donc de devenir propriétaire sans emprunt (reste la question du terrain), ce qui est un confort non négligeable.
Il n’est pas possible de tout avoir dans moins de 20 m², mais avons-nous vraiment besoin de tout ? Un des principaux intérêts de la tiny house, c’est qu’on peut l’adapter précisément à ses besoins.
Par exemple, je cuisine beaucoup mais je passe peu de temps dans la salle de bain. Dans mes appartements d’étudiante, j’ai eu à plusieurs reprises une « kitchenette » minuscule inutilisable et une salle de bain immense, avec une baignoire, ce qui ne me servait objectivement pas à grand-chose. Si je construis (ou fais construire) un jour une tiny, je privilégierai une « grande » cuisine et un simple bac de douche. J’ai également besoin d’un grand bureau pour travailler sur ordinateur mais n’ai pas besoin de place pour une télévision. Certain·es se satisferont de deux tiroirs pour l’ensemble de leurs vêtements et d’autres rogneront sur la cuisine pour stocker leur 30 paires de baskets.
Réduire son espace de vie oblige à faire des choix, mais permet d’avoir un lieu d’habitation parfaitement adapté à nos besoins et nos habitudes. Et ça permet aussi de réduire considérablement la surface de ménage. Rien que pour ça, je signe !
On ne va pas se mentir, il est plus facile d’emménager dans une tiny quand on est célibataire que quand on est une famille avec 5 enfants ! Mais j’ai vu une famille de 4 + un gros chien vivre en tiny, donc j’imagine que tout est faisable.
Je pense que c’est surtout une question d’envie : si rien que d’envisager la possibilité d’utiliser des toilettes sèches vous décourage, ou si vous tenez absolument à posséder plein d’objets plus ou moins encombrants, ça n’est peut-être pas fait pour vous ! Et ça n’est pas grave, l’important est de trouver l’habitat et le mode de vie qui nous correspondent (et d’avoir les moyens de se l’offrir, oui).
Si vous passez beaucoup de temps à l’extérieur, que vous faites beaucoup de sport dans la nature (vélo, randonnée, slackline, escalade…) ou que vous aimez jardiner par exemple, pourquoi ne pas passer du temps à vous aménager un potager, un verger ou à vous installer un salon de jardin plutôt qu’à faire le ménage des 80 m² dans lesquels vous ne faites que manger et dormir ?
Pour finir, parce qu’un peu d’autodérision ne fait jamais de mal :